L'humain se rend-t-il obsolète?

Une reflexion sur "qui suis-je?" et "à quoi sers-je?"
JCZD

“L’humain se rend-t-il obsolète?” est pour moi une une question devenue fondamentale et probablement déterminante dans la suite de mes actions.

Le lecteur est rendu attentif que la cible de chaque lien, chaque note de bas de page est indispensable à la compréhension de ce texte (et que même ça c’est peut-être insuffisant, il y a à presque autant de notes que de texte, et c’est sans compter les liens ; la tendance est alors totalement inverse) : prenez le temps de vous imprégner du contenu de cet article. Toutefois, j’ai essayé de l’écrire de sorte à ce que l’on puisse le lire de bout en bout sans s’attarder sur les références et quand même en comprendre le fond : j’espère avoir réussi cet exercice périlleux.

Premièrement

Ne pas confondre “à quoi sers-je” et “à quoi Serge”1: si c’est un problème pour vous, autant faire une pause le temps de comprendre la distinction.

Deuxio

On constate que depuis fort fort longtemps, on a inventé l’esclavagisme. On s’est par ailleurs rendu compte que c’était un truc pas très sympa et que - même si c’est un terme qui est très pratique en technologie - on aimerait bien s’en défaire2. On constate par ailleurs qu’un humain qui a des esclaves (ou profite des esclaves d’un autre humain) s’en sort économiquement salement mieux qu’un humain qui n’a pas d’esclave à disposition ou qui est lui-même un esclave : voir aussi l’esclave énergétique.

La définition d’esclave peut être généralisée à quelque chose comme “machin(e) qui fait quelque chose pour quelque chose d’autre” : on a inventé des ordinateurs (lesquels ont remplacé de manière avantageuse le calculateur, puis par voie de conséquence et par la suite le robot qui n’est en somme qu’un esclave-calculateur muni d’actuateurs capables d’interagir avec le monde physique d’un manière un peu différente que de simplement vomir sur un écran (ou un papier, la différence est donc très subtile) le résultat des calculs qu’on lui demande d’effectuer par le biais d’un langage: ce langage (Français, Allemand, Telugu ou autre) n’est autre qu’une forme de langage de programmation suffisamment flou pour qu’on en arrive à créer d’autres langages - artificiels3 ceux-ci - dont on se rend compte (à l’instar de Python par exemple) qu’en fait la distinction entre langage naturel et langage construit est extrêmement floue : ce n’est en réalité qu’au fil de l’utilisation d’un langage qu’on se rend compte de ses limites et qu’on le fait évoluer (à part des aliens très rares et minimalistes comme le brainfuck4).

On constate différentes choses:

Troisio

On cherche à se débarrasser des esclaves : d’une part ils coûtent cher à l’entretien7, ils sont imprévisibles8 et peuvent par exemple se révolter ; il se peut aussi que leur langage évolue de façon distincte à celui qui donne les ordres (parfois par nécessité technique, voir aussi le mythe de la Tour de Babel9) ce qui les rend de-facto imprévisibles - mais ce n’est la faute à personne en particulier), d’autre part ils manquent parfois de précision10 et de répétabilité : on est tous content quand on a une imprimante 3D qui fonctionne et qui peut répéter - au centième de millimètre avec d’infimes variations à chaque couche - le quasi-même mouvement de sorte à obtenir un objet parfois utilisable et qui aurait généralement nécessité moins de temps/efforts combinés : tailler un bout de bois et y faire quelques trous est en effet généralement plus “troublesome”11 que de foutre un bordel pas possible à extraire du charbon pour alimenter des forges et machines à vapeur de sorte à construire des bateaux et les propulser au-delà des mers afin de coloniser des tribus/peuples qui deviendront nos esclaves afin de creuser leur propre terre (ou sous-sol)12 afin d’extraire des minéraux qui sont peut-être indisponibles dans nos contrées13, lesquels esclaves finiront inévitablement par se rendre compte que le ouiski de merde qu’on leur fournit ben ils savent en faire du mieux, idem pour toute la technologie qu’ils fabriquent à notre place comme des robots et qu’ils ont fini par rétro-ingéniérer parce que c’est inévitable lorsqu’on s’adonne à des tâches répétitives: on se met de facto dans un état méditatif intense qui tend à nous sortir de notre condition (d’esclave, parfois et même souvent de nous-même).

Revenons-en à nos moutons

Comme je le mentionnais plus haut, s’adonner à des tâches répétitives nous met dans un état méditatif intense, et garder des moutons est une tâche à priori bien laborieuse mais une fois qu’on a appris à sentir le loup et autres prédateurs, on se fait vite chier et donc - même inconsciemment - on se met à méditer. On cherche alors à trouver moyen de déléguer la tâche à laquelle on est occupé (tâche qui est assez peu exigeante pour nous permettre de méditer/diverger et que même dans certains cas on la délègue à des esclaves) à un(e) machin(e) qui n’a encore pas compris ou eu le/la loisir/chance/opportunité de garder les moutons. Parfois, le machin est humain, parfois pas (ça peut être un animal comme un chien de berger ou un robot) : le langage peut être dans ce cas des sifflements, des lignes de G-Code ou des claquements de doigts, mais le résultat est le même: on délègue.

L’humain se rend-il obsolète?

C’était la question du début, et on y vient. L’humain cherche - un peu malgré lui - à se défaire de toutes ses activités14 qui font de lui un humain: l’humain délègue donc - par voie de conséquence et par l’acquisition et l’accumulation de connaissances, techniques et outils - ses compétences et connaissances acquises au fil de milliers d’années d’évolution15 à des assemblages subtils d’atomes et autres particules auxquels on donne de plus en plus de capacité et de sens16 au point où on risque de donner à ces assemblages autant de capacité que nous-mêmes : on (humains) nous rendons donc nous-mêmes obsolètes au point peut-être de devenir inutiles et même nuisibles. De plus, un esclave coûte cher : il faut le loger, le nourrir, et lui permettre de se laver sinon il pourrit sur place (et c’est la même chose pour celui qui “détient” l’esclave)7.

Afin de prolonger cette dissertation sur une note qui laisse un peu plus d’ouverture (parce que là à mon avis c’est un peu déprimant), je mentionne une vision que j’ai eue suite à une rencontre aussi brève que formidable et imprévue : mais les détails sont pour un autre épisode.


  1. note d’humour qui ne sert peut-être pas à grand chose - voir “Dans un Galaxie Près de Chez Vous” - mais ça fait partie de mes références et donc de mon cheminement de pensée ↩︎

  2. voir “certaines organisations ont choisi de le remplacer par d’autres termes” sur https://fr.wikipedia.org/wiki/Maître-esclave ↩︎

  3. par exemple l’Esperanto, langue construite ↩︎

  4. même pas le morse! en effet, rien n’empêche sémantiquement celui-ci d’évoluer pour introduire de nouveaux caractères (parce que écrire par exemple “point d’interrogation” en morse c’est pas très pratique (il n’existe à priori pas de symbole morse pour "?") et on préfèrera d’autres formes syntaxiques plus compactes17, comme par exemple .- ... / - ..- / ..-. .- .. -- vs. - - ..- / .- ... / ..-. .- .. -- / .--. --- .. -. - / -.. / .. -. - . .-. .-. --- --. .- - .. --- -. lesquels ne sont ni l’un ni l’autre des formes validées par l’accadémie française (et pensez SVP à ceux qui communiquent en langage des signes) mais que l’on comprend quand même. ↩︎

  5. et ça c’est super important ↩︎

  6. référence nécessaire, merci de me contacter ↩︎

  7. une machine nécessite à peine moins d’entretien qu’un animal (du moins en apparence et de mon point de vue fin 2023 AD). ↩︎ ↩︎

  8. voir qqch comme https://duckduckgo.com/?q=ai+computers+develop+own+language&t=ffab&atb=v213-1&ia=web ↩︎

  9. inventer de purs nouveaux mots étant un exercice cognitif très difficile, on se contente en général de recycler des mots connus mais improbables dans un contexte donné: de cette façon, différents corps de métiers vont utiliser le même mot avec une signification totalement différente car le contexte est fondamentalement différent. ↩︎ ↩︎

  10. à la Chaux-de-Fonds en particulier (et dans les prisons chinoises18), on utilise toujours des humains pour effectuer certaines tâches comme assembler des mouvements de montre : or il s’avère qu’on est - à l’heure actuelle, fin 2023, totalement incapables de fabriquer des robots qui savent assembler des montres aussi vite et bien que des Suisses, ou couper des légumes aussi vite et bien que des Chinois↩︎

  11. et là j’ai beau chercher, je ne trouve pas d’équivalent en Français ↩︎

  12. alors là pas grand chose à voir mais c’est à mon avis une note sémantique intéressante: on parle de pédologie losqu’on étudie les sols alors qu’on parle de pédophilie lorsqu’on aime (un peu trop et de la mauvaise manière) les enfants: il n’existe à ma connaissance pas de mots pour exprimer l’“amour des sols” ou l’“étude des enfants” et cela est un soit un fait très gênant : voir aussi la note sur la Tour de Babel9 et le fait que de trop nombreux parents écrasent leurs enfants afin de voir plus loin au lieu de les élever : on dit en effet que “Il faut tout un village pour élever un enfant” tout comme “élever un enfant, c’est le porter sur ses épaules afin de lui permettre de voir plus loin”. La norme actuelle est tout autre - c’est bien triste - mais on peut changer cela et c’est là une des raisons de ce texte. On peut même dire qu’il faut non pas un village, non pas une ville, mais une civilisation toute entière pour élever un enfant. Ensuite et pour bien comprendre il faut lire la trilogie en cinq volumes de H2G2 (lire les livres, pas juste regarder le film) et en particulier lire les préfaces et tout ce qui vient avant le récit : c’est fondamental et d’une profondeur intense). ↩︎

  13. voir la distribution des “terres rares” par pays et ça devient carrément marrant (de mon point de vue en tout cas) quand on met ça en relation avec la surface de chaque pays - exercice dont laisse le soin au lecteur qui aura soin de me contacter si le travail est bien fait. ↩︎

  14. à part manger, boire, chier, pisser, baiser (et encore) ↩︎

  15. dans ce contexte, le terme évolution devient vraiment, mais vraiment très relatif ↩︎

  16. ce mot est intéressant car il est de ceux qui n’a pas de forme plurielle ↩︎

  17. on entre dans un domaine super intéressant qui est celui de Louis Braille qui est inventeur d’un précurseur de l’unicode, et des dialectes en général ↩︎

  18. voir Travail forcé, le S.O.S d’un prisonnier chinois et Hyperclean - Pistolet↩︎